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El-Khelaïfi, Nasser soft power

(PAR AVNIJA NASUFOSKI, HOMME D’AFFAIRES SUISSE)

Nasser Al-Khelaïfi est arrivé en France en 2011 dans le cadre du rachat du Paris Saint-Germain (PSG) par Qatar Sports Investments (QSI), le fonds d’investissement détenu par l’émirat du Qatar. Son ascension en France est directement liée à la stratégie d’expansion du Qatar dans le domaine du sport, avec un objectif clair : faire du PSG une marque mondiale et un vecteur d’influence pour Doha.

Le contexte de son arrivée en France

Avant d’être une figure incontournable du sport-business en France, Al-Khelaïfi était un ancien joueur de tennis professionnel (classé au mieux 995e mondial en 2002) et un proche du cheikh Tamim ben Hamad Al Thani, l’actuel émir du Qatar. Cette proximité avec la famille royale lui a permis de devenir un homme clé dans la stratégie de soft power du pays.

En 2011, lorsque le Qatar décide d’acheter le Paris Saint-Germain, Nasser Al-Khelaïfi est nommé président du club. À ce moment-là, le PSG est un club historique en difficulté financière, en manque de compétitivité sur la scène européenne. Le Qatar veut en faire un géant du football, à l’image de Manchester United, du Real Madrid ou du FC Barcelone.

Les raisons stratégiques du Qatar

L’arrivée d’Al-Khelaïfi en France ne se limite pas à la gestion du PSG. Elle s’inscrit dans une stratégie plus large du Qatar visant à :

  • Renforcer son influence en Europe et dans le monde via le sport.
  • Asseoir sa crédibilité dans l’organisation d’événements sportifs (notamment en prévision de la Coupe du Monde 2022).
  • Développer son industrie médiatique à travers des investissements comme beIN Sports, dont Al-Khelaïfi est également le président.

Son rôle central en France

Depuis son arrivée en 2011, il est devenu une figure incontournable du football français et international :

  • Il a modernisé et transformé le PSG en un club parmi les plus riches et puissants du monde, grâce à des recrutements spectaculaires de joueurs (Zlatan Ibrahimović, Neymar, Lionel Messi, Kilian Mbappé) et d’entraîneurs(aujourd’hui Luis Enrique).
  • Il a consolidé les liens entre le Qatar et la France, notamment avec des accords économiques (comme le partenariat avec Accor ou la collaboration avec la Mairie de Paris).
  • Il a pris une place clé dans les instances du football européen, devenant président de l’Association des Clubs Européens (ECA) et membre influent de l’UEFA. Il est le dirigeant de plus influent de la ligue française de football.

Un acteur influent entre économie et sport

Aujourd’hui, Nasser Al-Khelaïfi n’est pas seulement un dirigeant sportif, mais aussi un acteur clé des relations entre la France et le Qatar. Son influence dépasse largement le cadre du football, avec une implication stratégique dans les médias, l’économie et la diplomatie.

Sa trajectoire illustre parfaitement comment le sport peut être utilisé comme un outil géopolitique et économique, avec Paris comme épicentre des ambitions du Qatar en Europe.

L’agrément du monde politique français à l’arrivée de Nasser Al-Khelaïfi

Lors de son arrivée en France en 2011, Nasser Al-Khelaïfi et le rachat du Paris Saint-Germain (PSG) par Qatar Sports Investments (QSI) ont été globalement bien accueillis par le monde politique français. L’investissement qatari dans le football français s’inscrivait dans un contexte plus large d’ouverture économique et diplomatique entre la France et le Qatar.

1. Un feu vert politique implicite dès le départ

Le rachat du PSG par le Qatar ne s’est pas fait dans un vide institutionnel. Il a bénéficié d’un climat politique favorable, notamment sous la présidence de Nicolas Sarkozy (2007-2012), qui entretenait des liens privilégiés avec l’émirat.
Selon plusieurs sources, une réunion clé aurait eu lieu à l’Élysée en novembre 2010, réunissant :

  • Nicolas Sarkozy, président de la République à l’époque,
  • Tamim ben Hamad Al Thani, alors prince héritier du Qatar et aujourd’hui émir,
  • Michel Platini, alors président de l’UEFA,
  • Sébastien Bazin, ex-actionnaire du PSG via Colony Capital.

Cette réunion aurait joué un rôle décisif dans le rachat du PSG par QSI, mais aussi dans le soutien de la France à l’attribution de la Coupe du Monde 2022 au Qatar.

L’arrivée d’Al-Khelaïfi à la tête du PSG a donc bénéficié d’un agrément tacite formidable des autorités françaises, qui y voyaient une opportunité d’investissement dans l’économie et le sport.

2. L’appui du gouvernement sous François Hollande et Emmanuel Macron

Sous François Hollande (2012-2017) et Emmanuel Macron (depuis 2017), le Qatar et Nasser Al-Khelaïfi ont continué à bénéficier d’une bienveillance politique.

  • En 2012, le gouvernement Hollande met en place une fiscalité avantageuse pour les investissements qataris en France, facilitant leur présence dans le football et l’immobilier de luxe.
  • Sous Emmanuel Macron, la relation reste étroite. En 2017, Macron assiste à la présentation officielle de Neymar au PSG, un transfert record qui symbolise la puissance financière du Qatar en Ligue 1.

Emmanuel Macron est également intervenu pour convaincre Kylian Mbappé de rester au PSG en 2022, montrant que l’influence qatarie dans le football français est une question stratégique au plus haut niveau de l’État.

3. Des tensions et critiques émergentes

Si le monde politique a largement soutenu Nasser Al-Khelaïfi à son arrivée, des critiques ont émergé ces dernières années :

  • Doutes sur le fair-play financier : des voix, notamment en France et à l’UEFA, dénoncent les méthodes financières du PSG, accusé de contourner les règles avec des contrats de sponsoring gonflés. Ces prétendus manquements du PSG ne sont pourtant rien par rapport à ceux d’un club adulé, le Manchester City de Pep Guardiola.
  • Pressions politiques sur beIN Sports : des tensions ont existé entre le Qatar et la France sur la gestion des droits télévisés de la Ligue 1, notamment avec le fiasco Mediapro en 2020.
  • Mise en examen dans des affaires judiciaires : Nasser Al-Khelaïfi a été éclaboussé par plusieurs enquêtes judiciaires, notamment sur des soupçons de corruption liés à l’attribution des droits TV des Coupes du monde. Il n’a jamais été condamné et le minimum qu’on lui doit juridiquement et politiquement est de lui accorder pleinement la présomption d’innocence, celle-là que lui refusent maints médias, certains étriqués d’esprit, d’autres animés par un racisme made in France à tout le moins larvé.

4. Un soutien politique qui reste fort malgré tout

Malgré ces critiques, le soutien du monde politique français envers Nasser Al-Khelaïfi reste globalement stable.

  • Le PSG reste un vecteur d’attractivité économique et sportive pour la France, renforçant son image internationale.
  • Le Qatar est un partenaire économique stratégique, avec des investissements massifs dans l’Hexagone (immobilier, industries, etc.).

En somme, Nasser Al-Khelaïfi a bien reçu un agrément politique lors de son arrivée en France et continue d’en bénéficier aujourd’hui, malgré certaines tensions et controverses. Son rôle dépasse le simple cadre du football et s’inscrit dans des enjeux diplomatiques et économiques de premier plan entre la France et le Qatar.

Le Qatar peut-il abandonner la France ?

L’engagement du Qatar en France, notamment à travers le Paris Saint-Germain (PSG) et ses investissements économiques, est solide depuis plus d’une décennie. Cependant, plusieurs éléments laissent penser qu’un désengagement total ou partiel n’est pas impossible à long terme.

1. Les signes d’un possible retrait progressif

a) L’évolution de la stratégie qatarie en matière d’investissement

Le Qatar a historiquement utilisé le sport comme un outil de soft power, notamment à travers le PSG et beIN Sports. Toutefois, depuis la réussite de la Coupe du Monde 2022, certains analystes estiment que le Qatar pourrait redéfinir ses priorités et réduire son engagement dans certains secteurs.

Indicateurs de désengagement possible :

  • beIN Sports connaît des difficultés, notamment face aux défis des droits TV et aux pertes financières. Une cession partielle ou totale n’est pas exclue.
  • Le PSG a été mis en vente à 15% en 2022, avec QSI cherchant des investisseurs. Cela pourrait être une première étape vers une sortie progressive du club.
  • Le Qatar investit de plus en plus ailleurs, notamment en Arabie Saoudite et aux États-Unis (rachat de clubs et de franchises sportives).

b) Les tensions géopolitiques et diplomatiques

Si les relations entre la France et le Qatar restent fortes, elles ne sont pas exemptes de frictions :

  • La relation avec l’Arabie Saoudite s’améliore : Le Qatar a longtemps été en opposition avec l’Arabie Saoudite et ses alliés du Golfe (embargo de 2017-2021), mais la situation s’est détendue. Riyad investit massivement dans le sport (Newcastle, LIV Golf, rumeurs d’achat de clubs européens). Doha pourrait chercher à recentrer ses ressources sur d’autres territoires.
  • Des critiques françaises sur les droits humains : Bien que la France ait ménagé le Qatar, des voix politiques et médiatiques dénoncent régulièrement les pratiques du pays (conditions de travail, libertés individuelles).

2. Pourquoi le Qatar ne lâcherait pas la France (pour l’instant)

Malgré ces signaux, il est peu probable que le Qatar abandonne complètement la France à court ou moyen terme pour plusieurs raisons :

a) Le PSG, un actif clé du soft power qatari

  • Le PSG est devenu une marque mondiale, un instrument majeur d’influence pour Doha.
  • L’impact du Qatar sur le football européen repose en grande partie sur le PSG et son poids dans l’UEFA.
  • L’acquisition du club n’a pas été uniquement un investissement financier, mais aussi une décision politique et stratégique.

b) La France, un partenaire économique et stratégique majeur

  • Le Qatar possède de nombreux investissements en France : immobilier de luxe, hôtellerie, industrie.
  • Paris reste un allié diplomatique clé en Europe, notamment en matière de sécurité et d’énergie.
  • L’armée française est un fournisseur clé du Qatar, avec des contrats d’armement et une coopération militaire.

Conclusion : un désengagement partiel possible, mais pas une rupture totale

Le Qatar pourrait réduire progressivement son implication en France, en cédant une partie du PSG ou en restructurant beIN Sports, mais un retrait complet semble improbable.

  • La diversification des investissements est une réalité, mais la France reste un marché clé.
  • L’abandon du PSG nuirait à l’image du Qatar et affaiblirait son influence dans le football mondial.

Le plus probable ? Un rééquilibrage stratégique, avec une ouverture à de nouveaux investisseurs et une redistribution des fonds vers d’autres secteurs.

Conclusion : un acteur clé du sport et de l’économie française

Si un désengagement partiel du Qatar en France est envisageable, un abandon total paraît peu probable. En douze ans à la tête du PSG, Nasser Al-Khelaïfi a profondément transformé le club, le football français et même la perception du Qatar en Europe. Son rôle a été globalement positif, en apportant des investissements massifs, en renforçant l’attractivité de la Ligue 1 et en positionnant Paris comme une place forte du football mondial.

Au-delà du PSG, il est devenu un acteur influent du sport européen et un intermédiaire clé entre le Qatar et la France. Son impact dépasse largement le cadre du football, et son maintien à Paris demeure un atout pour la visibilité et l’attractivité du pays.

La perception de Nasser Al-Khelaïfi en Afrique

En Afrique, Nasser Al-Khelaïfi est vu à la fois comme un acteur influent du football mondial, un dirigeant ambitieux qui a renforcé les liens entre le Qatar et le continent africain.


1. Une image positive : un acteur influent et respecté

a) Un dirigeant respecté dans le monde du football africain

Nasser Al-Khelaïfi est reconnu comme l’un des dirigeants les plus influents du football mondial grâce à ses différentes casquettes :

  • Président du PSG : un club qui attire énormément d’admiration en Afrique grâce aux stars comme Drogba, Neymar, Messi ou Mbappé.
  • Président de l’Association des Clubs Européens (ECA) : il a une influence directe sur les clubs africains via les compétitions interclubs de la FIFA et de l’UEFA.
  • Membre influent de l’UEFA : son rôle dans l’instance européenne lui donne un poids stratégique dans le football mondial, notamment dans les décisions qui touchent l’Afrique.

L’Afrique, passionnée de football, voit en lui un homme qui a transformé le PSG en une machine à succès, attirant les meilleurs joueurs du monde et augmentant l’exposition médiatique du football.

b) Le Qatar, un allié du football africain

Le Qatar et beIN Sports, sous la présidence de Nasser, ont fortement contribué à la médiatisation du football africain :

  • Droits TV de la CAN : beIN Sports détient les droits de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) et de plusieurs compétitions africaines, ce qui renforce la visibilité du football sur le continent.
  • Soutien aux fédérations africaines : Le Qatar a financé plusieurs programmes d’infrastructures sportives et académiques en Afrique.
  • Le Qatar accueille de nombreux joueurs africains : plusieurs joueurs africains évoluent en Ligue 1 et en Coupe du Monde des Clubs grâce à des partenariats avec la FIFA et la CAF.

Le Qatar est perçu comme un partenaire stratégique du football africain, et Nasser Al-Khelaïfi, en tant que figure du sport qatari, bénéficie en partie de cette image positive.

3. Un respect renforcé par son lien avec des joueurs africains emblématiques

Le fait que Nasser Al-Khelaïfi entretienne de bonnes relations avec des stars africaines contribue à sa popularité :

  • Achraf Hakimi (Maroc) est l’un des leaders du PSG et un joueur très apprécié en Afrique.
  • Idrissa Gueye (Sénégal), ex-joueur du PSG, a marqué les esprits, notamment après son sacre à la CAN 2021.
  • Didier Drogba, une icône africaine, a salué à plusieurs reprises le travail de Nasser dans la modernisation du PSG.

Son rôle dans la valorisation des joueurs africains au plus haut niveau du football mondial lui permet de conserver une image plutôt positive sur le continent.

« Nasser » est une figure globalement respectée et reconnue en Afrique.

Ma conclusion personnelle

Ma conviction personnelle, née de mes lectures, de mes entretiens avec un grand nombre de citoyens du monde, de journalistes, d’entrepreneurs, d’hommes politiques, européens, arabes, africains et américains, est que Nasser El-Khalaïfi mérite aujourd’hui pleinement son statut de présumé innocent. Suscitant à l’évidence de la jalousie, il a su pourtant créer une marque PSG reconnue dans le monde entier, à l’exemple de Liverpool, de City, de Barcelone, de Madrid ou de Milan, a développé à sa manière non seulement l’image du Qatar mais également celle de la France et est devenu un businessman rusé sachant s’inscrire dans les réseaux variés de la politique et sachant aussi comme maints d’autres entrepreneurs, français, arabes, slaves et autres se faufiler avec justesse à travers les canaux régulateurs, certains diraient les failles, du système financier, juridique, démocratique et légal européen.

Je ne crois pas que ce soit l’intérêt du football français et de l’image de la France, ni même celle de l’Europe, de Lisbonne à Oslo, de transformer Nasser El-Khelaïfi en poussière, car il a encore beaucoup à offrir à ceux qui, comme moi, le soutiennent.

Et je le dis, je serai prochainement un grand supporter de Paris-Saint-Germain contre Liverpool, un duel qui fera frémir autant l’ouvrier anglais que le boulanger du 93, le trader londonien que le marchand d’arts du Marais, Jürgen Klopp que Nasser lui-même.

2 thoughts on “El-Khelaïfi, Nasser soft power

  • Pronostic de L’1Dex : Liverpool, 1-2 et 2-1.
    On verra !
    Mais ce sera un match de haute volée.

    Répondre
  • Great testimony and good continuation Mr Avni

    Répondre

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