La métaphore de la forêt noire

Mohamed Al Ganzi se rend chez son avocat. Depuis deux ans, il est angoissé par un avancement si peu diligent de la procédure pénale qu’il a dû consulter un psychologue et un psychiatre, ne supportant plus la pression due à l’incapacité du système institutionnel, d’ici et d’ailleurs, de faire avancer dans la célérité un dossier, ne sachant dès lors de quoi son avenir sera fait.

Mohamed doit se rendre une fois de plus chez une nouvelle procureure qui entend, après une communication de fin d’enquête, se convaincre de la culpabilité de cet étranger au teint pas propre pour rédiger dans la foulée un acte d’accusation.

Je ne vais pas vous conter l’histoire de Mohamed. Je dirai simplement avec force sa complète innocence. Mais là n’est pas le sujet puisque l’Arabe devra de toute manière répondre des actes qui ne sont pas les siens à moins d’un improbable sursaut du bon sens.

Les policiers ne sont pas parvenus à le confondre, mais ces éminents détectives, de par leur expérience que personne ne voudra remettre en question, savent qu’un Arabe, ça ment si fort qu’un acte délictuel commis, il n’est plus pensable que l’on puisse échapper à son destin par la grâce du principe in dubio pro reo. Nous, on sait, donc ouste le doute, direction la prison !

Mais tout ça ne peut satisfaire un étranger qui va imaginer, même contre l’avis de son médecin, que la prison et l’expulsion vont lui briser la nuque tôt ou tard. L’avocat est plus optimiste, même s’il sait, plafond blanc l’assistant, que tout est possible en ce bas monde.

Mais voici que la gourmandise le prenant, il affronte l’Arabe, en mode panique, et lui explique que la vie est un gâteau composé de plusieurs tranches, fines ou épaisses, amères ou douces. Considérons ainsi une tranche inconnue, celle des trois prochaines années, durée estimée d’une procédure s’achevant au tribunal fédéral puisque ce doute légal impossible à lever sans un aveu mensonger indécent convaincrait n’importe quel homme de loi qu’il ne serait pas imaginable que l’affaire se conclue par autre chose qu’un acquittement, fut-ce par devant la très haute cour de notre pays.

Alors imaginons dès maintenant ensemble cet acquittement promis qui lèverait toute cette angoisse délétère, que devraient connaître certains magistrats peu empathiques leur permettant alors seulement de comprendre l’âme des plus retors. A quoi auraient servi trois années de stress, de souci, d’ulcères et d’insomnies, puisque dans trois ans à peine l’innocence sera établie que seule une mauvaise lecture d’un dossier s’aviserait aujourd’hui de nier.

Le hasard gouvernant l’indicible justice, tel est le propos du plafond blanc, et l’air propre étant préférable à des eaux toxiques, selon la métaphore de la piscine, pourquoi ne pas considérer dès aujourd’hui le ciel bleu valaisan, celui de ce 27 septembre par exemple, et anticiper l’éclat de rire qui ponctuera, peut-être par un couscous marocain de communion ou par une paëlla catalane, cette date inscrite déjà dans un futur certain.

L’incertitude est cette arme avec laquelle des méchants croient pouvoir vous briser alors que leur mauvaiseté, inscrite dans leur esprit, n’est que celle qui, à travers les hasards de la vie, leur assurera un enfer de désespéré(s) à leur âme de pollueur.

Mohamed, qui a trouvé un excellent travail dans une institution valaisanne renommée, a retrouvé, me semble-t-il, ce sourire qui l’avait quitté lorsqu’il a été confronté à ce monde de justice si étonnant.

Moi, tout bêtement, je te dis merci, Mohamed, de m’avoir initié sans le savoir à toutes les saveurs cachées de la forêt noire.

Stéphane Riand

Licencié en sciences commerciales et industrielles, avocat, notaire, rédacteur en chef de L'1Dex (1dex.ch).

2 pensées sur “La métaphore de la forêt noire

  • 27 septembre 2023 à 21 h 45 min
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    Au nom du Père cantonal, le droit n’est qu’à mère ?

    Manau – Star druG ide :
    https://youtu.be/ioWrnuHsmbc?si=PbffgrSLmjRUtb6f

    […]
    Avec son ami favori qu’il rejoignait souvent pour comprendre et maîtriser les mots
    De nos désirs à nous simplement, tel conversés, il savait faire avec le corbeau
    Ce qui me manque plus que tout aujourd’hui
    Même si je sais bien, qu’au fond, son esprit
    Est parmi nous, il n’est jamais parti
    Devant vous, j’avoue
    Que l’oiseau me l’a dit
    Que l’oiseau me l’a dit
    […]

    Répondre
  • 28 septembre 2023 à 10 h 06 min
    Permalink

    J en ait une a offrire au MPC ; la tranche j adore …

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