Paule Mangeat. Côté Rue
Référence :
Paule Mangeat, Côté Rue, éditions cousu mouche, 2007, 142 pages
Au Salon littéraire Mauvais Genre, au Manège d’Onex, Paule Mangeat s’est présentée à moi avec ces mots : « Je suis une Pâquisarde ». Après avoir lu Côté Rue, 4ème édition, « la dernière » lui a assuré sa maison d’édition, je rectifie : Paule Mangeat est un écrivain pâquisard, une auteure genevoise qui dégomme le lecteur avec un style sans pareil.
Certains noteront de l’humour noir dans le jeu de mots, « la faim d’un amour », une voracité dans le manger, « une bouchée de tes pieds », un clin d’oeil dans l’allusion, « je ne te pensais pas si savoureux, mon amoureux », de la gastronomie dans le propos, « Les mollets ? En civet. Et ton gras ? En papet vaudois. Et les côtes ? En grillades. Et les bras ? En saucisse d’Ajoie. Et la tête ? En paupillette. » Paule Mangeat, croyez-moi sur parole, est une carnassière, ses crocs s’amusent avec le dictionnaire et font couler le sang sans désemparer.
L’autrice (quel signifiant sans âme !) traite son lecteur comme un scélérat qu’elle peint avec une mélasse de luxure et de chansons paillardes.
Et c’est au moment où vous devinez un être démembré sans âme, s’étiolant dans une mare de vilenies, que la voilà transformer un maire et un curé, par la grâce de Mamasac et de Célestin, en êtres humains de chair et de sang, ceux-là mêmes sur lesquels vous auriez adoré peu de pages auparavant planter dans leurs coeurs vos lames les plus acérées.
Les mots les plus crus précèdent le Manifeste d’une femme du XXIème siècle : « Elle avait alors tendu la main à son sac, sorti sa plume et son cahier. A l’envers, il avait réussi à litre un titre : l’artiste ». Ces deux dernières phrases vous paraissent fades ou communes. Mais c’est là la démonstration que Paule Mangeat n’a jamais craint d’entendre les hurlements de ses lecteurs coupables de trop de plaisir.
