Verbiergate. Une seule question sérieuse

Le 10 novembre 2015, le Conseil communal de Bagnes a décidé de prononcer le licenciement de Gabriel Luisier en raison de l’affaire des constructions illicites.

Le 31 août 2016, le Conseil d’Etat, à la suite d’une écriture du 19 juillet 2016 du ministère public cantonal allant dans le même sens, libérait du secret de fonction une ribambelle de conseillers et fonctionnaires communaux en admettant que tous les conseillers communaux étaient impliqués dans l’affaire des constructions illicites.

Cette décision du 31 août 2016, préparée par le Département des institutions et rédigée par le Service des affaires intérieures et communales, ne sera connue de Gabriel Luisier et de son mandataire qu’en décembre 2022 [1].

Le tribunal de district de l’Entremont puis la Cour pénale du tribunal cantonal ont condamné pour faux dans les titres au sens de l’article 251 du code pénal le président de la commune et pour faux dans les titres commis dans l’exercice de fonctions publiques au sens de l’article 317 du code pénal le secrétaire communal. La Cour pénale, par la juge Béatrice Neyroud, reconnaissait explicitement les liens consubstantiels existant entre le licenciement de l’employé communal et l’affaire des constructions illicites. La fausseté de la date voulue intentionnellement par les signataires de la décision de licenciement avait pour but, disait en substance le tribunal cantonal, de cacher les vrais motifs de la résiliation des rapports de travail.

Surgit alors immanquablement chez tout juriste un brin curieux cette redoutable et simple question : comment a-t-il été possible que jusqu’à aujourd’hui les autorités administratives exécutives ou judiciaires du Valais n’aient pas encore simplement constaté la nullité ab ovo [2] de la décision initiale de licenciement ?

Des milliers d’écritures judiciaires, des centaines de milliers de francs de dépens, émoluments, honoraires, des ressources humaines à gogo [3] auraient pu être évitées si l’on avait simplement voulu constater le réel : une décision rendue par des conseillers communaux tous impliqués dans l’affaire des constructions illicites dans une affaire de licenciement motivée par lesdites constructions illicites était ab ovo de nullité absolue. On a poussé le bouchon si loin que l’on en est même venu à affirmer que l’employé communal licencié n’avait pas même la qualité pour agir pour faire constater la nullité de la décision de licenciement.

Il semblerait, croient certains, que le droit est plus compliqué que cette simple démonstration.

Je n’en suis pas sûr.

L’avenir, prochain ou pas, dira ce qu’il aura fallu penser de cette longue séquence.

Les paris sont ouverts [4].

[1] Pourquoi ?

[2] Du latin Ab ovo, signifiant « depuis l’œuf ». Utilisé par Horace dans son Art poétique et introduit en français par Étienne Pasquier au XVIe siècle. Composé de Ab, signifiant « dès », et ovo, signifiant « œuf ».

[3] A gogo exprime une quantité abondante ou illimitée de quelque chose. Abondamment ; à profusion ; à volonté ; autant qu’on le souhaite ; en abondance ; sans restriction ; ad libitum ; en veux-tu en voilà ; autant qu’on le désire ; à foison

[4] Photographie : à gauche, Maurice Chevrier, le Chef du Service des affaires intérieures et communales du canton du Valais; à droite, Gabriel Luisier, l’employé communal illicitement licencié à travers des faux dans les titres.

Stéphane Riand

Licencié en sciences commerciales et industrielles, avocat, notaire, rédacteur en chef de L'1Dex (1dex.ch).

2 pensées sur “Verbiergate. Une seule question sérieuse

  • 14 juillet 2024 à 11 h 33 min
    Permalink

    En France : « Crépuscule » de Juan Branco
    En Begique : « Le clan Reynders » de Philippe Engels
    etc…

    Répondre

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.