MERCI, TOUT SIMPLEMENT MERCI …

(PAR BEATRICE RIAND)

Trois consonnes et deux voyelles pour exprimer ma gratitude aux magasins Manor … mais non, que diable, cela ne se fait pas, non, c’est de la publicité déguisée ! N’en déplaise aux esprits chagrins, il y a des opérations commerciales qui n’en sont pas, parce qu’elles vont bien au-delà du concept de la vente, mais relèvent d’un souci partagé pour un thème d’actualité qui détruit la vie de bien des femmes.

Et bien peut-être qu’en ces temps où tout un chacun déambule dans la vie le regard braqué sur son téléphone, en ces temps où bien souvent la réalité virtuelle l’emporte sur la beauté du quotidien, en ces temps où les uns croisent les autres sans seulement les voir, oui, peut-être que l’on m’autorisera ces deux syllabes pour dire ma reconnaissance.

Grâce à un homme d’une grande ouverture, et je me permettrai de le nommer, Jean-Louis Bornet, j’ai pu échanger sur le thème du harcèlement, la gravité de ses conséquences, l’aveuglement des politiques sur le sujet (à l’exception des efforts louables de quelques conseillers valaisans ….), le désintérêt de la presse en général (mais pas les médias valaisans, et oui, décidément, on nous affuble bien souvent à tort de la casquette des retardataires arriérés). Cela n’a pas été un bref rendez-vous d’affaires, oui, je serais enchantée si vous pouviez m’introduire auprès des autres centres Manor de Suisse romande, bla bla, bla bla, ni une conversation superficielle. J’ai rencontré un patron, soucieux du bien-être de ses employés, révolté par certains comportements inadéquats, bien décidé à lutter contre ce phénomène. Un homme de bien.

Alors, oui, je lui envoie ces quelques lettres, ces quelques lignes pour le remercier. Pour tous les remercier. Parce que, savez-vous, bien au-delà de la fierté de voir J’aurais préféré Baudelaire heureux  hanter les librairies de cette chaîne, j’ai aimé les rencontres que j’y ai faites.

Je suis une consommatrice régulière des produits Manor – j’adore leurs yaourts ! – et je m’y rends chaque semaine. Mais si je fréquente les murs de cette enseigne, j’avoue avoir oublié les gens qui la peuplent. Peut-être suis-je un peu sauvage, et bien souvent distraite, perdue dans un monde intérieur qui parfois fait barrage, j’espère être toujours polie et aimable … mais durant toutes ces années, j’ai oublié d’entrer en relation.

J’ai oublié de sourire, j’ai oublié d’échanger, j’ai oublié que derrière les caisses, derrière les desks, il y a des gens. Et il m’a fallu aller à Sierre, Monthey, Vézenaz, Vevey, Nyon, Lausanne, Chavannes, Morges, Genève pour le comprendre. Aujourd’hui, quand j’entre dans le Manor de Sion, j’embrasse la très jeune responsable de la librairie, j’échange avec le chef de service, toujours affairé, j’entame une discussion quand je croise le directeur, passionné de littérature. Je n’entre plus seulement dans un magasin, j’entre dans un lieu dans lequel vont et viennent des personnes avec qui je suis désormais en contact. Je n’habite plus un paysage, je m’y inscris.

Et puis, savez-vous, dans mes pérégrinations romandes dans ces différents magasins, je m’y suis toujours reconnue. Enfant, fille de Valaisan et d’une Barcelonaise, je me souviens des insultes que parfois l’on me jetait au visage, parce que je n’étais pas tout à fait d’ici et que j’adorais l’ailleurs, parce que j’appartiens à ces montagnes sévères mais aussi, mais surtout à la mer. Parce que si je parle le français, je parle aussi le catalan et l’espagnol et qu’à cette époque on ne me le pardonnait pas. Alors je dis merci à toutes ces personnes d’origine différente avec lesquelles j’ai pu échanger, de Sierre à Genève, à tous ces responsables de librairie qui viennent du Portugal, de la France ou de la péninsule ibérique, qui aiment ce pays mais gardent en mémoire la fierté et l’amour de leur terre d’origine, et qui enrichissent notre quotidien avec une ouverture que nous devrions porter tous porter en étendard.

Oui, merci, merci pour l’accueil très chaleureux que j’ai reçu partout, merci pour les repas partagés, merci pour les cafés, les eaux minérales. Merci pour les sourires, pour le temps accordé à me recevoir.

Merci de m’avoir fait grandir encore.